On cite souvent 7 % d'effets secondaires optiques avec les implants multifocaux, qu'en penser ?

Dr ASSOULINE Michaël

Ophthalmic & Refractive Surgeon
dr.assouline@gmail.com - www.ienavision.fr

À partir de 40 ans la vision de près nécessite une correction optique différente de celle utilisée pour la vision de loin. C’est la presbytie. Pour compenser cette perte inéluctable de l’accommodation avec l’âge, il n’y a toujours pas de solution magique, mais seulement des compromis optiques acceptables.

On utilise le plus souvent pour les lunettes, des verres « progressifs » multifocaux dont la partie haute corrige la vision de loin et la partie basse pour la vision de près. C’est donc la direction du regard qui détermine la distance de netteté. Le principal inconvénient est la limitation de la liberté du regard. On ne peut regarder de près en haut, ou de loin en bas, par exemple pour descendre un escalier. La qualité de vision est aussi très médiocre sur les côtés. Les patients qui ne parviennent pas à bouger la tête plutôt que les yeux ne s’adaptent en général jamais à ces verres et sont condamnés à jongler avec deux paires de lunettes.

Lorsque l’on corrige la presbytie avec les lentilles de contact ou des implants intraoculaires, la correction optique bouge avec l’œil, et sera donc la même dans toutes les directions du regard. 
On a alors le choix entre deux principes différents :
•    Soit l’on corrige un œil de loin et l’autre près, que qui convient souvent, mais entraine le plus souvent une fatigue visuelle de chacun des yeux à long terme. C’est la monovision. 
•    Soit l’on sépare la lumière qui pénètre dans l’œil en deux, une partie pour la vision de loin et une partie pour la vision de près. C’est la multifocalité. 

Avec les lentilles ou les implants multifocaux, il se forme dans l’œil deux images superposées que le cerveau doit apprendre à utiliser en fonction du contexte. Pendant cette phase d’apprentissage, on perçoit constamment des effets visuels inhabituels, qui inquiètent beaucoup les patients s’ils n’y ont pas été préparés. Environ 30% des patients opérés avec des implants multifocaux se plaignent de halos lumineux autour des phares la nuit au bout d’un mois. Ils ne sont heureusement plus que 3 % au bout d’un an. Les patients se plaignent également de difficultés à voir les petits détails de près quand la lumière n’est pas assez bonne, et plus rarement d’éblouissements en cas de lumière trop vive.  Avec certains implants, moins souvent utilisés, les patients perçoivent également transitoirement un dédoublement des images vers le bas (par exemple les sous titres à la télévision). 

Il est très important de comprendre qu’on ne voit pas avec ses yeux mais avec son cerveau. Notre cerveau est remarquablement efficace pour « effacer » de notre vision les effets optiques indésirables inévitables des moyens actuels de correction de la presbytie, à condition de « l’autoriser » à le faire, et donc de ne pas d’angoisser inutilement à leur sujet.  

La quasi-totalité des patients reconnaissent à terme que ces problèmes ne sont pas gênants dans la vie courante, et sont parfaitement acceptables compte tenu de l’indépendance en lunettes qu’ils ont obtenue en échange. En très grande majorité, les milliers de patients que j’ai opérés avec des implants multifocaux témoignent que ce moyen de correction se révèle en définitive bien plus confortable que les verres progressifs ou les lentilles de contact multifocales qu’ils avaient auparavant, et qu’ils n’hésitent pas à le recommander chaudement à leurs proches.

Référence :
Michael Assouline et coll. "Multifocal Intraocular lenses for the surgical correction of presbyopia : a retrospective study of 1200 cases operated by a single surgeon".
Prix de la meilleure communication scientifique, Asia Pacific Academy of Ophthalmology, Hong Kong 2018

Pour en savoir plus, regardez la dernière interview télévisée du Dr Assouline sur Capital Santé
Implants oculaires, quoi de neuf ?  youtube.com/watch?v=VTBDFzZIYAk